Olivier Brossard et Gabriel Colletis
Présentation du thème : les économistes dans la Cité : expertise et statut des savoirs, aptitude à la prévision, responsabilité (p. 19-52)
Bernard Paulré
De la prévision en économie politique (p. 53–85)
Résumé :
Pour avoir mal ou pas du tout prévu la crise de 2007, les économistes se trouvent aujourd’hui en position d’accusés. Il est donc urgent et nécessaire d’examiner lucidement la façon de concevoir la prévision économique.
Nous identifions ce que doivent être, selon nous, les principes épistémologiques d’une pratique prévisionnelle consciente de ses propres limites et ouverte sur le monde et sur les autres disciplines, à partir de l’instruction de trois questions : (i) quels sont la nature et le statut des énoncés « prévisionnels »?, (ii) quelle est la validité des énoncés sur le futur? et (iii) quelles sont les relations entre science et prévision?
Nous insistons, dans cet examen, sur le caractère conjecturel des énoncés prévisionnels. Nous concluons en plaidant pour une conception sémiologique de la prévision économique et sur la pertinence du paradigme de l’indice.
Mots-clés : prévision, conjecture, ergodicité, signaux, indice, paradigme indiciel, prévisibilité.
Jean-Marc Olivier
Prédiction et prévision en histoire économique : les succès suisses et scandinaves étaient-ils prévisibles? (p. 87–96)
Résumé :
L’historien de l’économie dispose de multiples outils pour analyser les réussites économiques. Il parvient le plus souvent à les rendre logiques et évidentes, mais en ayant la chance de travailler sur des évènements passés qui ne peuvent pas contredire son raisonnement. Toutefois, l’analyse des plus beaux succès – suisses et scandinaves – nuance les modèles les plus couramment admis : comme l’exploitation de ressources naturelles abondantes, la révolution industrielle libérale à l’anglaise ou le triomphe de la grande usine. En effet, les développements suisse, suédois et norvégien offrent de belles pistes de réflexion car ils reposent davantage sur les PME, sur des politiques volontaristes et sur une maîtrise ancienne des statistiques.
Mots-clés : histoire économique, politique économique, statistiques, prévisions, harmonie créée, Suisse, Suède, Norvège, Scandinavie, Bernadotte, Gunnar Myrdal.
Michel Armatte
L’économiste dans la Cité: ingénierie et expertise (p. 97–131)
Résumé :
À la vision mythique et autiste d’une science économique pure réduite à sa version académique, et déconnectée des réalités, nous opposons une autre vision de l’économie comme ingénierie, agissant sur cette réalité et la transformant à son image. Pour en rendre compte nous développons des exemples empruntés à la finance, à l’économétrie, ou à la prospective climatique, et nous mobilisons des notions propres à l’histoire et la sociologie des sciences, et plus précisément à la tradition des sciences studies comme celles de performativité (Callon) et de régimes de savoirs et d’expertise (Pestre), ce qui nous permet de décrire différentes formes d’intervention de l’économiste dans la cité.
Mots-clés : ingénierie, performativité, expertise, finance.
Jean Luc Demeulemeester et Claude Diebolt
Renouveler la science économique néo-classique? Prendre l’historicité au sérieux (p. 133–160)
Résumé :
Cet article est une critique interne de la discipline économique et une tentative de faire prendre conscience au sein de la communauté des économistes de l’importance de réintroduire l’histoire et l’historicité dans la discipline.
Mots-clés : économie, méthodologie, histoire, cliométrie.
Jean-Robert Alcaras
Les théories économiques de la décision à l’épreuve de la quantification – Quand symboliser n’est pas forcément quantifier! (p. 161–194)
Résumé :
Les théories économiques de la décision accordent généralement une place centrale aux données quantitatives sans réellement questionner les processus de quantification dont elles résultent. Mais les travaux de Herbert Alexander Simon montrent que la décision est un processus socio-économique et cognitif de construction et de manipulation de symboles. On comprend alors que ces processus puissent inclure tous les types de modélisation s’exerçant par des symboles computables et donc interprétables – que ces symboles soient numériques ou tout autres. Observation qui conduit alors à s’interroger sur les processus qui les produisent et les transforment.
Mots-clés : processus de décision, rationalité procédurale, rationalité substantive, rationalité limitée, computation, symboles, quantification, constructivisme.
Monique Dalud-Vincent et Romuald Normand
Entre mesure, science et politique : construction et analyse d’un réseau international de copublications dans le domaine de l’éducation (p. 197–232)
Résumé :
Notre étude vise à repérer certains réseaux d’experts et de chercheurs, à l’oeuvre à l’échelle internationale, qui produisent de nouveaux référentiels et de nouveaux instruments de mesure pour améliorer l’efficacité et la qualité de l’éducation. Pour ce faire, nous utilisons la méthodologie de l’analyse des réseaux (dont l’outil Pajek) afin d’objectiver et d’étudier les liens de co-publications. La définition de ces liens repose sur un travail préalable de constitution d’une base de références bibliographiques contenant 5 300 références écrites par environ 3 500 auteurs. On met alors en évidence des communautés épistémiques clairement identifiées et rattachées à un paradigme: des chercheurs de la school effectiveness, des économistes du capital humain, des psychométriciens spécialistes des comparaisons internationales de résultats.
Mots-clés : réseau, mesure, co-publication, éducation, science, politique, Pajek, school effectiveness, capital humain, comparaison internationale.
Paul Chapron
Analyse de réseaux de pouvoir au sein d’une organisation sociale (p. 233–256)
Résumé :
La sociologie de l’action organisée s’attache à révéler le fonctionnement réel des organisations au-delà des règles formelles qui les codifient. Suivant une formalisation de cette théorie qui permet de modéliser la structure d’une organisation par un ensemble d’objets mathématiques, nous pouvons représenter la structure des relations d’interdépendance entre les acteurs d’une organisation. Des réseaux représentant les relations de pouvoirs entretenues par ces acteurs peuvent être extraits de ces modèles d’organisation. L’analyse structurale des réseaux sociaux a développé de nombreux outils pour révéler et étudier la structure et le comportement des réseaux sociaux, en mettant l’accent notamment sur la notion de pouvoir et d’avantage structurel. Nous voyons dans cet article comment quelques-unes des techniques de l’analyse structurale peuvent être appliquées dans les réseaux de pouvoir extraits de modèles d’organisations, et enrichir ainsi la compréhension des relations de pouvoir.
Mots-clés : sociologie de l’action organisée, modélisation d’organisations, système d’action concret, acteur, pouvoir, influence, analyse structurale, réseaux sociaux, centralité, SocLab.
Melchior Mbonimpa
Éthique des rapports Nord-Sud. Regards croisés, Gérard Verna et Florence Piron, directeurs, Québec, Presses de l’Université Laval, 2010, 362 p. (p. 257–260)